Jeudi 16 février dernier, le Conseil communal de Saint-Gilles a débattu du budget communal 2012. Ecolo s’est abstenu : le budget prévoit bien des investissements intéressants concernant l’enseignement ou l’enfance, mais ne nous semble pas assez ambitieux par rapport aux enjeux liés au boom démographique, ni par rapport aux problèmes de mobilité, de qualité de vie ou encore d’environnement.
En première lecture, les chiffres du budget laissent à penser que Saint-Gilles est une île au milieu de la crise. Les recettes sur l’impôt sur les personnes physiques sont en hausse (une augmentation de 5% est prévue en 2012 par rapport à 2011), tout comme les recettes liées au revenu cadastral ou aux taxes sur les bureaux. Au total, le budget est en boni de 900.000 euros, pour plus de 104 millions d’euros de dépenses au total. Le boni cumulé (les réserves dont dispose la commune) grimpe à 13 millions d’euros. C’est Saint-Gilles de plus en plus riche…
Un chiffre pourtant est à mettre en regard des précédents : la dotation au CPAS. Elle s’élève à 14,7 millions d’euros, soit 16% d’augmentation en deux ans… Le CPAS n’est pas devenu plus généreux, mais, malheureusement, de plus en plus de Saint-Gillois doivent s’adresser à lui : il sont aujourd’hui près de 2.500 et le nombre d’aides sociales a augmenté de plus de 20% en deux ans. C’est Saint-Gilles de plus en plus pauvre…
Quel paradoxe, donc ! Saint-Gilles est une commune de plus en plus  » branchée « , qui attire de plus en plus de personnes à revenus supérieurs. Mais en même temps, les personnes qui ont du mal à nouer les deux bouts sont de plus en plus nombreuses dans la commune. Ce phénomène de dualisation existe ailleurs, mais il est particulièrement aigu à Saint-Gilles.

Des pistes anti-dualisation

Un élément important de compréhension du phénomène est le marché de logement. Saint-Gilles est une des communes les plus touchées par l’augmentation des prix : ce n’est plus une commune  » bon marché « , mais une commune  » dans la moyenne  » de la Région bruxelloise, alors que les revenus des Saint-Gillois sont, eux, en dessous de la moyenne régionale. Plus que jamais, il est donc urgent d’activer les différents dispositifs dont dispose la commune Malheureusement, des problèmes de gouvernance plombent plusieurs outils  » logement  » communaux. Ainsi, l’Agence immobilière sociale (AIS) a toujours du mal à tenir la tête hors de l’eau, suite à la gabegie et les erreurs de gestion qui ont éclaté au grand jour en septembre 2010 : en 2012, la Commune va devoir allonger 200.000 euros (en plus des 100.000 déjà accordés en 2011) pour permettre à l’association d’apurer son passif. Plutôt que de se déployer, l’AIS gère en fait de moins en moins de logements. Nous demandons depuis longtemps – sans grand succès – que les comptes soient révisés et que les modalités de travail au sein du conseil d’administration soient modifiés, afin de garantir plus de transparence. Du côté de la Régie foncière communale, grâce à l’aide de financements régionaux, il y a de plus en plus de biens mis en location (850), mais la Régie n’active pas le dispositif d’allocation-loyer auquel ses locataires les plus démunis ont pourtant droit et, par ailleurs, ne respecte pas les prescriptions régionales concernant les plafonds de revenus des locataires.
Depuis quelques années, l’enseignement est devenu une priorité en terme d’investissements, de la part de la Commune. Plus de 2 millions d’euros (dont 1,5 à charge directe de la commune) sont ainsi budgétés en 2012, afin d’augmenter les capacités d’accueil. L’augmentation du nombre de places dans les écoles est très positif, mais la commune ne doit pas perdre de vue qu’elle doit aussi rencontrer l’enjeu de la qualité, y compris dans le secondaire. Pour le moment, trop de petits et jeunes Saint-Gillois doivent être scolarisés hors Saint-Gilles, faute d’offre adéquate. Nous sommes dans les quatre communes bruxelloises où le taux des élèves en âge de scolarité qui sont à l’école dans leur propre commune est le plus faible. C’est le résultat du fait que l’investissement dans l’enseignement n’a pas été considéré comme prioritaire pendant trop longtemps à Saint-Gilles. Si on veut promouvoir la mixité sociale et réhabiliter l’école dans son rôle d’  » ascenseur social « , il est indispensable qu’un maximum de Saint-Gillois, de toutes origines, puissent se scolariser dans les écoles saint-gilloises. La situation s’améliore doucement en maternelle et en primaire, mais il reste vraiment beaucoup de travail.

Des projets qui répondent aux besoins

Enfin, la commune a budgété 450.000 euros, qui seront subventionnés par la Région, afin de mener des études concernant de grands projets urbanistiques dans le quartier du Midi, ainsi que dans le quartier de la prison (qui s’en irait en 2016). Dans un cas comme l’autre, Ecolo est vigilant à ce que les projets répondent à des besoins effectifs dans ces zones : une diversité dans l’offre de logements (y compris avec des logements sociaux et conventionnés), des équipements collectifs, des espaces verts et de jeux, etc. Il ne s’agit pas que ces nouveaux développements urbains se fassent  » à la manière ancienne « , sans participation des habitants et sans tenir compte de leurs besoins, au profit des seuls promoteurs. Au vu des expériences antérieures, il n’est pour nous pas évident du tout que la majorité PS-MR puisse relever ce défi.
Tout comme elle semble incapable de relever le défi de la mobilité : le plan communal de mobilité, pour lequel des milliers d’euros ont été dépensés en rémunération de bureau d’étude, reste  » secret  » ou perdu dans les méandres de l’hôtel de ville. Pourtant, à l’été 2010 (!), un plan quasi finalisé avait été présenté à un groupe de travail du Conseil communal. A l’époque, il était prévu de soumettre ce plan à l’enquête publique, dans des délais courts. Depuis, plus de nouvelle ! A nos questions sur l’état d’avancement du plan, à l’occasion de ce budget 2012, le collège PS-MR a répondu par un silence embarrassé…
Du reste, c’est un peu la stratégie globale de l’équipe Picqué : mettre en exergue les actions positives, mais masquer les problèmes, éviter les sujets qui fâchent, étouffer les critiques. Car, à Saint-Gilles, c’est bien connu, tout va très bien, Madame la Marquise ! Il serait pourtant temps que la majorité prenne conscience du fait que l’augmentation de la dualisation sociale dans la commune va finir par mettre à mal la cohésion sociale, la convivialité et la qualité de vie. Le pouvoir communal n’a pas tous les leviers en main, mais il doit au moins agir sur ceux qu’il contrôle. Pour Ecolo, c’est une priorité.